Le cercle psy consacre un dossier au bébé « Le bébé. Sa vie, son œuvre »… C’est la première fois que je m’intéresse à ce magazine, mais cette petite bouille n’a pas manqué d’attirer mon attention… Regardez :
Mon alerte Vendredis Intellos a fait le reste et je l’ai acheté !
Je commence la lecture, et le premier article s’intéresse à la psychologie du fœtus.
On évoque beaucoup le ressenti de celle qui le porte pendant 9 mois, mais le fœtus lui, on se demande ce qu’il perçoit, ce qu’il ressent, ce qu’il apprend ? Et surtout ces premières expériences auront-elles des conséquences pour lui, pour son devenir ?
Daniel Mellier professeur de psychologie et directeur du laboratoire de Psychologie et neurosciences de la cognition et de l’affectivité à l’université de Rouen nous apporte des réponses.
Les méthodes pour étudier cette psychologie du fœtus sont multiples :
- De façon indirecte, l’expérience des mères, des professionnels de la santé tels que les médecins ou les sage-femmes est mise à profit
- De façon directe, on étudie entre autres les mouvements, le rythme cardiaque du fœtus et la mise en relation avec des modifications environnementales
- Les prématurés peuvent aussi apporter des confirmations d’observations in utero dans la mesure où ils sont considérés comme des fœtus extra-utérins et où malgré un environnement différent, l’hypothèse d’une certaine parenté peut être faite
- Le modèle animal peut également être utilisé
Ces études permettent d’aborder un aspect à la fois, la sensibilité aux odeurs, à la musique, au langage…
L’ordre d’apparition des sens chez le fœtus ?
Le sens du toucher, de l’équilibre et de l’odorat apparaissent les premiers, avant l’audition et la vision. Au sixième mois de grossesse, les systèmes tactiles et olfactifs sont plus matures que les autres, mais on sait maintenant que même si un système n’est pas complètement mature, il fonctionne d’ores et déjà. Voilà pourquoi il est important de considérer que les systèmes chez le prématuré, s’ils ne sont pas encore matures, sont bel et bien fonctionnels et qu’ils doivent être considérés et protégés des stress éventuels.
Le toucher serait donc déjà fonctionnel en premier, mais dans ce cas le fœtus est-il capable de reconnaître différentes matières ?
Ce qui est observé chez le fœtus au dernier trimestre de la grossesse, est une reconnaissance des formes grâce aux mouvements et aux variations dans la pression de ses mains. L’observation chez des fœtus de 28 semaines permet de constater que des objets arrondis ou des prismes sont différenciés, ils modulent la pression et les mouvements de la main, ce qui constitue une activité exploratrice, qui va alimenter sa mémoire et ses émotions. Bien sûr, le fait que la main du fœtus se serre sur l’objet fait partie des réflexes, mais il est capable de figures très organisées de la motricité globale. Ainsi l’enfant vient au monde avec un répertoire de comportements moteurs beaucoup plus vaste qu’on ne pouvait l’imaginer, déjà entraînés, et qui permettront plus tard le retournement, la marche, le 4 pattes…
Pour ce qui est du goût et de l’odorat qu’on ne peut distinguer, une petite expérience consistant à faire absorber de l’anis aux mamans 10 jours avant la naissance permet de constater qu’à la naissance, bébé s’oriente vers des lingettes imprégnées de cette odeur. Le liquide amniotique que le fœtus absorbe recèle des odeurs qu’il distingue et mémorise, avec le goût en prime.
Pour le son, on sait que si de la musique est diffusée suffisamment près de lui, le fœtus réagit par des mouvements, une modification du rythme cardiaque par exemple. Le cas de deux bébés dont les mamans ont fait profiter de leur passion musicale durant la grossesse à leurs futurs bébés, l’une harpiste, l’autre version rock, a permis notamment de constater que les bébés étaient tranquillisés par la musique de leur maman mais pas du tout par l’autre ! Il en va de même pour les voix que le fœtus perçoit, notamment celle de sa mère qu’il distingue le mieux, avec une nette préférence pour la langue maternelle.
Pour la vision, qui reste encore immature à la naissance, on observe que lors d’une intervention nécessitant l’introduction d’une fibre optique, les yeux du fœtus se meuvent vers la source lumineuse.
Force est de constater que le fœtus, comme le bébé, préfère ce qui lui est familier, et cela parce qu’il apprend en permanence ! Ce qu’il reconnait c’est non seulement la sensorialité, mais aussi le contexte, c’est lui qui va créer la familiarité.
Mais si le fœtus ressent toutes ces sensations, il vient alors une question quant à la douleur, est-elle ressentie ? Une question très difficile nous dit l’auteur !
On observe des variations dans l’activité du fœtus, lorsque la maman lui raconte un évènement qui l’a marquée, le fœtus est donc sensible à l’état émotionnel de la mère. Mais pour autant, éprouve-t-il lui-même des émotions ? En fin de grossesse, des recherches anglaises on permis d’isoler des expressions de son visage, correspondant aux émotions fondamentales comme la joie et la peur. Des mères confrontées au plus près du terrible évènement du 11 septembre 2001 ont accouché plus tôt que prévu d’enfants plus chétifs que la moyenne, le stress important de la mère ayant ainsi pu être ressenti par le fœtus, impossible cependant de dire si le fœtus a pu ressentir de la peur… On sait par contre que des stress prénataux notamment des toxiques tels que l’alcool par exemple peuvent constituer des facteurs de risque important mais les conséquences psychologiques à long terme peuvent ne pas être présentes, dans la mesure où les conditions de vie satisfaisante peuvent les effacer. Un phénomène d’augmentation de la vulnérabilisation est évoqué à propos du stress prénatal, il ne rendrait pas vulnérable mais il s’agirait plutôt d’une action sur le processus qui rend vulnérable.
Reste alors l’interrogation quant à ses expériences intra-utérines, ont-elles une influence toute notre vie ?
Ce qui se passe dans le ventre de la mère définit des caractéristiques différenciant les bébés les uns des autres après la naissance, leurs manières de réagir, ce qu’on appelle en psychologie le tempérament. Ce qui se construit ensuite c’est la personnalité. Il est plus facile d’expliquer le tempérament que la personnalité par la vie intra-utérine. Des éléments vont être contrariés, d’autres favorisés par les conditions de vie. On ne peut absolument pas dire que psychologiquement, tout se joue avant la naissance!!